Conférence donnée à Pont Lagrand (05) le 22 août 2015 à l’occasion de l’Université Buissonnière des Sciences Citoyennes.
Maryvonne HOLZEM est chercheuse et linguiste.
Maryvonne Holzem pose comme préalable que les méthodes des sciences de la nature sont généralisantes alors que celles des sciences de la culture sont individualisantes mais que cela ne joue pas sur la rigueur des travaux menés.
Ce rappel étant fait, Maryvonne Holzem explique que la subjectivité n’a rien de péjoratif et qu’il faut s’opposer à l’individualisme méthodologique dès lors qu’il est question de culture et d’humanités : il nous faut croire en la construction plus qu’en l’accumulation, en l’éducation plus qu’en l’idéologie managériale, aux récits fondateurs plus qu’aux chroniques, aux connaissances plus qu’aux simples compétences…
Et pour cause. Les théories mathématiques ayant présidé à l’émergence des sciences de l’information et de la communication, elles ont donné lieu à une vision réductionniste dans le développement du «numérique» occasionnant des menaces pour les sciences de la culture : standardisation sur des principes industriels, limite des abonnements numériques (non accès aux archives en cas de résiliation de l’abonnement par exemple…)… Concrètement, avec l’apparition et le développement d’une industrie dont Google est l’emblème, les mots ont perdu leur valeur d’usage, ils sont devenus des produits sur lesquels les utilisateurs n’ont aucune emprise ; c’est ce qu’on appelle le capital linguistique. Les mots deviennent des données, ils sont extraits de leur contexte et réorganisés et le fait d’y donner accès régit leur «existence». Pour autant le «numérique» est aussi une chance pour les sciences de la culture : les oeuvres de la culture humaine peuvent être remises sur «la table de travail» pour une ré-interprétation ; le numérique permet de faire parler un corpus à condition de choisir la lecture plutôt que le profilage. En d’autres termes, les sciences de la culture remplacent l’économie de la diffusion par une déontologie de l’interprétation.
Enregistrement et montage réalisés par l’association Kheper.