Communiqué de presse – Toujours trop peu de démocratie dans la recherche européenne

Par
mercredi 24 avril 2024

Miniature

Le 2 avril 2024, le collectif Horizon TERRE, coordonné par les organisations Sciences Citoyennes, Ingénieurs Sans Frontières et Atécopol, a transmis le communiqué de presse suivant sur la recherche européenne :

« L’Union européenne vient de lancer le processus d’élaboration de son programme de financement de la recherche pour la période 2028-2034. Celui-ci sera largement influencé par les travaux d’un comité regroupant 15 expert·es spécialistes de l’innovation technologique. Plusieurs organisations dénoncent le risque d’accaparement des financements par des groupes d’intérêt et appellent à lancer des conventions citoyennes pour mieux orienter les budgets de recherche.

Au niveau européen, la recherche est financée par les Framework-Program for Research and Technological Development (abrégé en FP). Ces programmes sont votés tous les sept ans. Lancé en 2021 le FP9, appelé Horizon Europe, est doté de 95,5Md€, soit 8% du budget de l’UE. Il sera remplacé fin 2027 par le nouveau programme FP10.

Comme pour Horizon Europe, le processus d’élaboration de FP10 sera influencé par un High Level Group (HLG) composé de 15 « expert·es » désigné·es par la Commission européenne qui rendra ses conclusions en fin 2024. Certains membres du HLG ont de nombreux liens d’intérêts avec l’industrie ou avec des multinationales (Meta, Google ou Volkswagen par exemple) lorsqu’ils ne sont pas directement dirigeant·es d’entreprises. Les sciences humaines et sociales y sont sous représentées (3 membres sur 15) tandis que la plupart des personnes de ce groupe travaille sur des innovations technologiques, comme les biotechnologies, l’intelligence artificielle, la biorobotique ou encore les détecteurs photoniques à usage militaire dit « smart munition ». La composition du groupe fait craindre que FP10, comme Horizon Europe, ait vocation à mettre la science au service de la croissance économique et de la compétitivité industrielle, via toujours plus d’innovations technologiques, en mettant de côté des solutions plus simples, mais qui peut-être répondraient mieux aux enjeux complexes de changement de société.

Lors de la préparation d’Horizon Europe, certaines organisations ont dénoncé les aspects anti-démocratiques du HLG. Ces critiques semblent toujours autant d’actualité : alors que la science et la technique façonnent largement nos sociétés, pourquoi est-ce que ces décisions, dotées de budgets publics conséquents, sont exemptées de débat démocratique ?
Regroupant des chercheur·euses, des étudiant·es et des associations, le collectif Horizon TERRE a élaboré depuis 2019 un programme alternatif à Horizon Europe en montrant la pertinence d’envisager d’autres orientations. Ces alternatives de recherche s’appuient moins sur les hautes-technologies et peuvent s’avérer moins coûteuses et plus en phase avec l’intérêt général et les impératifs écologiques. De manière similaire, l’ADEME a proposé des scénarios permettant d’atteindre la neutralité carbone, dont certains s’appuient également sur les low-tech, la sobriété et des changements comportementaux et organisationnels.
Face à la diversité de visions envisageables pour la recherche, il apparaît nécessaire que ces choix émanent d’un débat démocratique. Celui-ci apparaît d’autant plus important dans un contexte où la défiance envers la science est croissante. Pour cela, Horizon TERRE propose de remplacer le HLG par une Convention Citoyenne qui définira les orientations budgétaires pour la recherche. Là où les membres du HLG sont engagé·es dans des liens d’intérêts, les participant·es à la convention citoyenne sont tiré·es au sort, sans liens d’intérêt, reçoivent une formation diversifiée et délibèrent pendant plusieurs semaines. Les conventions citoyennes ont déjà montré qu’elles peuvent apporter des solutions constructives pour répondre aux enjeux de société complexes. »

(Ce communiqué a également été soutenu par le Mouvement pour des Savoirs Engagés et Reliés).