L’esprit du Grenelle s’arrête-t-il aux portes du ministère de la recherche ?

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vendredi 25 janvier 2008

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Les associations de l’Alliance pour la Planète s’indignent des récentes décisions du gouvernement en matière de recherche, qui vont à l’encontre des engagements du Grenelle.

Paris, 25 janvier 2008 – L’Alliance pour la Planète s’indigne de la décision du gouvernement d’allouer 45 millions d’euros à la recherche sur les OGM. Conviées à une rencontre avec Valérie Pécresse, la ministre de la Recherche, le 8 février, les associations réclameront que la société civile soit associée à la définition des priorités de la recherche concernant la mise en oeuvre des engagement du Grenelle de l’environnement.

« La démocratie écologique s’arrête-t-elle aux portes du Ministère de la Recherche ? » s’interroge Jacques Testart, ancien président de la Commission Française du Développement Durable et président de la Fondation Sciences Citoyennes. « Les recherches d’aujourd’hui définissent en grande partie ce à quoi ressemblera notre société dans vingt ans. Dans une société démocratique, il est temps que les citoyens et les associations soient associés à la définition des priorités de la recherche publique, et que ces décisions cruciales pour les générations futures ne soient pas laissées entre les seules mains des industriels. »

Les ONG contestent ainsi la décision du gouvernement de confier la définition des priorités de la recherche pour la mise en oeuvre des engagement du Grenelle à un « comité opérationnel recherche » composé en grande partie d’industriels, et excluant la société civile [1]. Ce comité, présidé par la présidente-directrice de l’INRA, « déclinera de façon opérationnelle les conclusions du Grenelle en matière de recherche et de technologie » et devra rendre ses conclusions fin juin. Par ailleurs, peu après l’annonce du déclenchement de la clause de sauvegarde sur le maïs OGM Mon 810, la ministre de la Recherche, Valérie Pécresse, a annoncé l’octroi de financements exceptionnels à la recherche-développement pour les biotechnologies végétales [2]. La somme annoncée de 45 millions représente, selon le gouvernement lui-même, huit fois plus que les crédits jusqu’ici alloués à ce secteur de recherche. Pendant ce temps l’agriculture biologique, dont le développement est un des objectifs de Grenelle, reste le parent pauvre de la recherche agronomique [3].

L’Alliance pour la Planète estime que ces décisions sont en complète contradiction avec les engagements et l’esprit du Grenelle, fondé sur une démarche partenariale incluant la participation des associations, et réclame que la société civile soit associée à la définition des priorités de la recherche publique.

« Si les biotechnologies peuvent être un outil de recherche intéressant, il est incohérent de nous préparer un avenir biotech alors que les plantes transgéniques n’ont toujours pas fait la preuve de leur utilité, » ajoute Jacques Testart. « Contrairement à ce qu’affirme Valérie Pécresse, les chercheurs en agriculture biologique ont eux aussi besoin de « sérénité », et de moyens, et cette recherche est elle aussi « porteuse de formidables espoirs » ! »

« Les solutions miracles « haute-technologie » promues par les industriels d’un secteur peuvent apparaître séduisantes mais se révèlent souvent être de fausses bonnes idées, coûteuses et parfois dangereuses », prévient Claudia Neubauer, directrice de la Fondation Sciences Citoyennes. « Des pistes de recherche tout aussi innovantes, d’intérêt général mais moins intéressantes pour le secteur privé, doivent aussi pouvoir être envisagées par le comité recherche issu du Grenelle. C’est le point de vue que nous ferons valoir auprès de la ministre de la Recherche le 8 février prochain. »

L’association pour une Fondation Sciences Citoyennes a pour objectif de favoriser et de prolonger le mouvement actuel d’appropriation citoyenne et démocratique de la science, afin de la mettre au service du bien commun. Elle est membre de l’Alliance pour la Planète, une coalition d’associations de protection de l’environnement et de syndicats.

Contacts :

Jacques Testart, président de la Fondation Sciences Citoyennes, 01 43 14 73 65

Claudia Neubauer, directrice de la Fondation Sciences Citoyennes, 01 43 14 73 65

Eric Gall, Fondation Sciences Citoyennes, 06 17 64 14 28 ou 01 43 14 73 65

http://sciencescitoyennes.org


[1] http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid20747/installation-du-comite-operationnel-recherche.html

[2] http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid20763/decision-mais-mon810-message-fort-d-encouragement-aux-chercheurs.html

Voir également l’article paru dans Le Monde du 22 janvier, Valérie Pécresse réaffirme le « devoir de recherche » sur les OGM

[3] Le journal Les Echos relève ainsi que « l’agronomie biologique doit donc faire avec les moyens du bord alors qu’elle doit relever plus de paris que son homologue chimique », et qu’en matière de recherche « la France arrive derrière les Pays-Bas, la Suisse et le Danemark malgré une forte agriculture » (L’agriculture biologique en quête de science, Les Echos, 11 septembre 2007).

Par ailleurs, l’INRA indique que 110 équivalent temps-plein travaillent sur l’agriculture biologique, sur un personnel de 9000 personnes, soit environ 1,2% de l’effectif de l’INRA.