Règles pour la qualité et la crédibilité de la procédure

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mercredi 2 juin 2010

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Les « conférences de citoyens » se sont récemment multipliées (on en dénombrait 4 jusqu’en 2008 puis 4 en 2009-2010) en négligeant de plus en plus la rigueur du protocole qui permet la validation de ces procédures. De plus, à la suite de la proposition du député Jean Léonetti, un projet de loi devrait être adopté pour confier au Comité national d’éthique l’organisation de CdC. Dans la discussion parlementaire préliminaire on a pu voir les députés de toutes tendances se débattre pour priver ce projet de toute consistance démocratique réelle (voir Des Conférences de Citoyens organisées par le Comité national d’éthique ?). Aussi il nous a paru nécessaire d’énoncer brièvement quelques règles, inspirées par la proposition de loi de la FSC (voir projet de loi), sans lesquelles les CdC perdraient leur crédibilité et donc leur vertu exceptionnelle d’aide à la décision.

Le commanditaire : Il doit apparaître clairement et être en capacité de prendre en compte les avis délivrés par la CdC pour l’établissement des lois ou règlements. Si plusieurs ministères sont concernés, l’implication du premier ministre est nécessaire pour éviter la dispersion des responsabilités. Le commanditaire doit prévoir a minima 9 mois pour organiser une conférence simple.
Ne pas faire : une procédure accélérée ; organiser une CdC sans possibilité d’en suivre les avis.

Le sujet : La CdC porte sur un sujet d’intérêt général suscitant des controverses ; il doit avoir acquis un certain degré de maturité. Son thème doit être circonscrit à une ou quelques questions précises. Dans le cas des thèmes très généraux, plusieurs conférences peuvent être organisées dans plusieurs lieux, chacun porteur d’un sous-thème, et les panels de citoyens impliqués doivent être réunis un week-end pour faire eux-mêmes la synthèse.
Ne pas faire : thème trop vaste, imprécis ou immature.

Constitution du panel de citoyens : le tirage au sort sur liste électorale doit être la règle. Ce choix initial est suivi de plusieurs correctifs : s’assurer de la disponibilité, de l’indépendance et de l’intérêt des citoyens par rapport au thème, créer une diversité maximale et écarter les personnes impliquées à titre personnel.
Ne pas faire : recruter des personnes déjà identifiées (professionnels des sondages, anciens participants à une CdC…).

Constitution du comité de pilotage : le comité de pilotage doit être indépendant de l’organisateur pour en assurer l’objectivité. Il doit comporter des spécialistes du débat public et des spécialistes du sujet en discussion. L’ensemble doit représenter une palette de savoirs et de positions variées sur le thème choisi.
Ne pas faire : comité de pilotage homogène ou consensuel.

Contenu de la formation : Le comité de pilotage doit établir le programme (thèmes, intervenants, cahiers d’acteurs,…) par consensus afin que soient exposés/discutés aussi bien les principaux savoirs consensuels que les aspects controversés en éclairant sur les raisons de ces controverses.
Ne pas faire : fuir le contradictoire en recherchant une formation “neutre”.

Désignation de l’animateur : il doit être un professionnel de l’animation, n’ayant aucun lien avec le sujet traité, recruté par le seul comité de pilotage, indépendant du commanditaire et de l’éventuel prestataire de services organisant les aspects matériels de la CdC.
Ne pas faire : accepter l’animateur apporté par un acteur de la procédure.

Déroulement de la formation : au moins 2 WE (séparés par plusieurs semaines) dont le premier est pédagogique (initiation) et le second fait intervenir des experts d’avis variés.
Ne pas faire : formation accélérée ou incomplète.

Débat final en public : les citoyens doivent choisir eux-mêmes les personnalités et porteurs d’intérêts à interroger.
Ne pas faire : imposer aux citoyens l’ensemble des experts

Rigueur procédurale : neutralité absolue de l’animateur ; anonymat des citoyens ; éviter absolument tout contact non programmé entre les formateurs et porteurs d’intérêts et le panel de citoyens ; rédaction de l’avis par les citoyens eux-mêmes.
Ne pas faire : toute influence sur le panel de citoyens qui ne soit pas prévue par le programme de formation ; accès des formateurs/organisateurs (ou de personnes extérieures) au panel en dehors des moments d’intervention prévus par le protocole.

Privilégier une réception des citoyens du panel qui soit de bonne qualité (hôtel, repas) et la seule indemnisation des frais engagés par les citoyens plutôt que leur rémunération.
Ne pas faire : participer à une CdC doit rester une action citoyenne, pas un complément de revenu.

A toutes les étapes, la transparence est requise grâce à la vidéo du processus et à la publication de la procédure ; une évaluation indépendante de l’ensemble doit être réalisée a posteriori. Le public, et particulièrement les citoyens du panel, doivent être avertis de toutes les suites données à l’avis Ne pas faire : dissimuler certains points de la procédure (composition du comité de pilotage, programme de formation,etc) ; refermer la fenêtre une fois la CdC terminée, y compris sur les suites politiques données aux avis.