Les publics grenoblois peuvent-ils participer aux choix scientifiques et techniques ?

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lundi 10 octobre 2005

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Préambule : Le terme nanotechnologie est apparu il y a quelques années pour désigner un nouveau domaine en émergence, lié à la maîtrise de la matière à l’échelle nanoscopique (de 0,1 à 100 nanomètres). Ce phénomène d’émergence n’est pas sans comparaison avec les biotechnologies dans les années 1970/80.

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Rapport_nanotech

Comme pour les bio, les nanotechnologies désignent pour partie des activités nouvelles et d’autres qui renvoient à des technologies anciennes. Le terme sert volontiers à renommer des activités afin de bénéficier des crédits réservés à ce domaine stratégique. A cet ensemble hétérogène est associée l’idée de rupture, de révolution technologique. « Demain, compte tenu des propriétés de la matière à l’échelle nanoscopique, on fera mieux, plus vite et moins cher », revendiquent les promoteurs des nanotechnologies. En même temps, les nanotechnologies cristallisent des enjeux stratégiques et économiques.

« L’Europe a raté la révolution des biotechnologies, ne ratons pas celle des nanotechnologies », déclarait Philippe Busquin, alors Commissaire Européen en charge de la recherche. Dans cette logique, il est impératif de prendre rapidement position dans un domaine qui connaît une croissance exponentielle. Le nombre de publications scientifiques et de brevets augmente de plus de 20% par an. Comme pour les biotechnologies, le discours des promoteurs européens des nanotechnologies s’articule autour de deux idées complémentaires : la promesse d’un monde meilleur lié à la révolution technologique et le risque pour l’Europe de ne pas se hisser au rang des économies fondées sur la connaissance.

Ce discours a deux limites. En premier lieu, cette « économie des promesses » renvoie à une conception linéaire du progrès, aujourd’hui largement remise en cause. Nos sociétés ont appris que l’on ne règle pas l’ensemble les problèmes sociaux avec plus de technique, que les nouvelles connaissances créent de nouvelles incertitudes, que les innovations techniques génèrent de nouveaux risques en même temps qu’elles sont source de gains de productivité et que les techniques transforment le monde social.

Au-delà des fausses certitudes, on sait qu’un progrès ne vient jamais seul et qu’il n’est pas neutre ; la mise en débat des choix techniques doit permettre de mettre en évidence ces dimensions de façon à restaurer des possibilités de maîtrise démocratique des évolutions technologiques. En même temps, cette économie des promesses génère un univers très précoce d’attentes autour de grandes fictions collectives. La compétition internationale et la logique de l’urgence qui lui est liée peuvent donner le sentiment qu’il n’y a pas de possibilité de choix et que la seule alternative est d’être dans la course ou de ne pas y être.

Si nous avons accepté de mener cette mission sur la mise en débat des projets de R&D en nanotechnologies, c’est parce que nous pensons que nous ne sommes pas réduits à une telle alternative.

Nous pensons que, bien au-delà de ce discours des promesses et des impératifs, il faut construire des espaces de mise en débat de tels projets ; il faut que les discussions et les délibérations nourrissent les processus décisionnels et contribuent à la démocratisation des choix techniques.

Nous pensons qu’un tel objectif est extrêmement ambitieux, qu’il y faudra du temps et des moyens, une implication forte de la société civile, des chercheurs, des acteurs économiques et des politiques. Mais nous pensons que, même si la tâche est difficile, même si les résultats sont incertains, l’enjeu est tel qu’il est nécessaire d’agir.

Nous ne revendiquons donc pas une position de neutralité mais au contraire un engagement en faveur de la démocratisation des choix scientifiques et techniques qui nous a conduits à accepter cette mission.


Table


Préambule

1. Introduction

2. Diagnostic

2.1. Le débat public sur les nanotechnologies : le retard français

2.2. Les projets de développement des nanotechnologies à Grenoble

2.3. Analyse du débat grenoblois sur les nanotechnologies : un débat embryonnaire, mais comportant des risques de polarisation

2.4. Des questions pour le débat public

2.5. Les espaces grenoblois de la démocratie participative et les niveaux de décision pour les nanotechnologies

2.6. Conclusion : 6 messages à retenir

3. La participation du public à l’évaluation technologique

3.1. Les enseignements généraux des expériences d’évaluation technologique participative

3.2. Expériences de participation réalisées ou en cours sur les nanotechnologies

3.3. Conditions d’une évaluation participative réussie

4. Recommandations

4.1. Considérations générales

4.2. Recommandations

5. Références

Annexe 1. Liste des auditions

Annexe 2. Sites internet

Annexe 3. Partenariats institutions – citoyens pour la recherche et l’innovation (PICRI)

Contribution complémentaire de la Fondation Sciences Citoyennes